:Interview de Claude Pauquet

Le Centre contemporain d’art photographique, en partenariat avec la Ville, organise un parcours photographique en 3 lieux. Cette année : découvrez l'oeuvre de Claude Pauquet.

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Pour la troisième année, le Centre contemporain d’art photographique, en partenariat avec la Ville de Niort, organise un parcours photographique en trois stations qui invite à pénétrer en profondeur dans l’univers d’un photographe. Cette année, ces trois lieux d’art et de culture visitent et décryptent l’œuvre de Claude Pauquet dans sa grande diversité.

Il présente trois séries très différentes les unes des autres, qui posent la question de la frontière entre les sphères publiques et privées, entre ce qui paraît et ce qui est.

  • Vous avez réalisé la série « Private/18-35 » avec de jeunes Niortais ?

Claude Pauquet : Après avoir abordé la question de la sphère familiale dans la série « Family », dont on peut voir la partie « Lussac » à la Villa Pérochon, je me suis intéressé aux jeunes de 18 à 35 ans, sans enfant, qu’ils soient en couple ou célibataires pour aborder à travers eux la question de l’intimité.

  • Comment les avez-vous recrutés ?

Claude Pauquet : Contrairement à la série « Crossing Madrid » où j’arrêtais les gens dans la rue, pour obtenir quelque chose entre l’instantanée et le posé, je suis passé tout d’abord par le Facebook de la Villa Pérochon et du Camji, puis le bouche-à-oreille a fonctionné. L’idée était totalement différente et se rapprochait de ce que j’avais fait sur « Family » : travailler avec mes modèles sur une mise en scène de leur intimité. Je les ai photographiés chez eux, pour la plupart, après un travail préparatoire durant lequel nous fixions un scénario.

  • La mise en scène transparait volontairement dans ces deux séries.

Claude Pauquet : Elle pose le rapport à la réalité. Nous parlons d’intimité, mais nous choisissons ce que nous allons vous montrer et comment nous allons vous le montrer. Une démarche pleine de questionnements troublants à la fois pour les modèles et pour le photographe.

  • Le lien, pour surprenant qu’il soit, est vite trouvé avec la série « Fake » sur les techniques de marketing qui permettent de vendre tous les produits en agitant les mêmes grosses ficelles.

Claude Pauquet : Effectivement, cette série pose différemment la question de ce qui est et de ce que l’on donne à voir. Il est surprenant de constater que, sur les salons, l’on vend des armes, de l’érotisme ou des voitures en utilisant le même décorum, ce qui entraîne de drôles de télescopages.

  • Cela pose la question de la valeur intrinsèque des choses puisque le « paraître » dans ce cas prend le pas sur ce qui est. La question de la valeur est aussi au cœur de la série « 35 ans d’ancienneté », beaucoup plus douloureusement.

Claude Pauquet : C’est une série de portraits sans autre mise en scène que le cadrage sur fond neutre réalisée à l’occasion d’un reportage pour Libération, lors de la fermeture d’une usine à Châtellerault en 2009. J’avais été frappé d’entendre dans la bouche de tous les ouvriers la même question  « Et toi, tu as combien d’ancienneté ? », car cette ancienneté conditionnait le montant de la prime de licenciement. Mais au-delà de la question sur la valeur numéraire du travail s’exprimait celle sur ce qui ne se mesure pas : ce que l’on investit de soi dans une entreprise. Cette série a été achetée par le FRAC.