:Cyril Barnier, l'économie sociale et solidaire sur le terrain

Rencontre avec Cyril Barnier, vidéaste documentariste, acteur de l'économie sociale et solidaire.

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Vidéaste documentariste, Cyril Barnier a pu réaliser son projet professionnel en intégrant une coopérative d’entrepreneurs. A travers le récit de son parcours et de ses engagements, il revendique une volonté de « travailler autrement ». Rencontre avec un acteur de l’économie sociale et solidaire.

  • En quoi consiste précisément votre métier et quels projets audiovisuels avez vous déjà réalisés ?

"Je suis vidéaste dans le domaine « nature et environnement »,  je produis des films institutionnels et des films documentaires dont certains nécessitent un an de tournage. Je réalise aussi des reportages photos. Je suis engagé dans la défense environnementale. Avec Agrobio Poitou Charentes, j’ai par exemple   travaillé à la réalisation d’un film sur le thème du gaspillage alimentaire en milieu hospitalier intitulé « Moins de gaspillage, plus de bio ».
Actuellement, je participe au programme  «  LIFE+ Tortue d’Hermann » qui a pour but de mener des actions en faveur de la conservation de l’espèce et j’assure la réalisation d’un documentaire sur les menaces que rencontre cette tortue terrestre.  Mais si j’ai été formé à filmer les animaux dans la nature, je filme aussi les humains. On est souvent obligé de parler de l’homme si on veut parler de l’animal".

  • Qu’est ce qui vous a motivé à exercer cette profession et quel à été votre parcours ?

"J’ai toujours voulu faire du film animalier... mais j’ai d’abord fait des études de bio mathématiques et passé un Master. Mon diplôme obtenu je suis resté un an à la recherche d’un emploi. Là, j’ai rencontré un ami qui sortait de l’IFFCAM de Lyon, il m’a expliqué ce qu’il faisait et je me suis dit que je voulais faire pareil. Même si je n’avais jamais touché une caméra avant cela, j’ai déposé une candidature à l’IFFCAM de Ménigoute et j’ai été choisi. Je suis sorti de l’IFFCAM en 2009".

 

  • Aujourd’hui vous faites parti d’un collectif d’entrepreneurs, AlterNature Média. Comment est-il né ?

"Avec cinq amis vidéastes, on  souhaitait créer quelque chose ensemble mais on ne savait pas quoi. On se réunissait chaque semaine pour savoir si on allait monter  une association, une SARL ou une SCOP. Notre objectif était de nous assurer l’équivalent d’un SMIC. Deux d’entre nous avaient déjà le statut d’auto-entrepreneurs lorsque nous étions dans l’attente de la création de notre structure. Nous avons présenté un dossier pour obtenir une bourse, mais elle nous a été refusée. On nous a alors conseillé de prendre contact avec une société coopérative et participative, Oxalis. On a ainsi pu fonder AlterNature Média en 2012. Aujourd’hui il n’y a pas de lien de subordination entre nous. Nous sommes un collectif d’entrepreneurs dans la SCOP Oxalis".

 

  • Qu’est ce qui vous a incité à rejoindre cette coopérative ?

"Grâce à elle, nous sommes des salariés qui gérons notre entreprise. N’ayant pu obtenir des aides par les voies traditionnelles, c’est Oxalis nous a aidés au développement de notre activité. Au départ, nous sommes liés sous la forme d’un CAPE (contrat d’appui au projet d’entreprise) qui offre un cadre simple pour accompagner la phase test. Ce contrat est signé pour 6 mois ou 1 an. Ensuite nous devenons salarié d’Oxalis. Nous investissons environ 8% de notre chiffre d’affaires dans la SCOP, mais elle nous le redistribue. En laissant une partie de notre revenu à la coopérative, c’est un peu comme si on se payait nous-même puisque Oxalis c’est nous!
Une entreprise classique doit aussi faire appelle à des comptables et des juristes; chez Oxalis, des permanents assurent tout cela et ils sont très impliqués. Lorsque aujourd’hui nous devons faire appel à d’autres intermittents du spectacle, les permanents d’Oxalis nous aident et mettent tout en œuvre pour dégager un maximum de salaire pour l’intermittent. On y voit que des avantages !"

 

  • Qu’est ce que cela vous apporte d’un point de vue professionnel et personnel ?

En entrant dans la coopérative nous avons trouvé  plus de 200 personnes avec lesquelles nous avons des idéaux communs. Il y a des boulangers, des épiciers, des sculpteurs, 27 groupes métiers sont aujourd’hui répertoriés. Bien que n’ayant pas la même activité, nous sommes tous liés : en cas de coup dur, celui qui marche permet à l’autre de ne pas faire faillite. Cela évite les emprunts, la prise de risque est calculée. On travaille pour les autres et l’on sait que cela va être réciproque. Il y a un vrai principe de solidarité. On dispose d’un intranet, on peut ainsi répondre en commun à des appels d’offres. Cela favorise la création de liens car chacun est une richesse pour l’autre. Les rapports sont tellement plus humains. Quand j’appelle des boites de productions, ils veulent du produit, du rentable, ce n’est pas du tout le même son de voix !

 

  • Vous qui êtes engagé dans l’économie sociale et solidaire, quelle en est votre définition ?

"C’est presque le contraire de la tendance actuelle. Notre démarche est de mettre l’économie au service des personnes et non l’inverse. On coopère pour que chacun puisse avoir une activité respectable. Quand on travaille dans l’ESS on n'essaie pas de s’enrichir, le profit individuel est proscrit, les résultats sont réinvestis. Les modes de gestion sont démocratiques et participatifs. L’entreprise cherche à favoriser la participation du plus grand nombre aux processus de décision sur les orientations de la coopérative ; c’est le principe  «  une personne = une voix ».

 

  • A celles et ceux qui souhaiteraient créer ou développer leur activité dans l’économie sociale et solidaire, quels conseils donneriez vous ?

"Il  faut prendre contact avec des SCOP, se rendre aux réunions d’accueil, rencontrer des professionnels qui pourront partager leur expérience. Le forum « métier formations création d’emploi en ESS » est l’occasion de faire connaître les valeurs de l’économie sociale et solidaire, de présenter les formations permettant d’accéder à ces métiers. C’est un rendez-vous régional à ne pas manquer. Moi , j’y serai !"

Propos recueillis par Bérangère Rabiller
(Le 4 novembre 2013)

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